En partant de Tourguénievskaya

14- Balade en partant de la station Tourguenievskaya catégorie de L’amour de l’architecture et l’Histoire de de la Russie et de l’Union soviétique

Accès : par la station de métro Tourguenievskay (ligne orange), ou encore Sretenski boulevard (ligne verte claire), ou station Tchisty Proudy (ligne rouge), ou dans le prolongement d’une balade qui serait partie de Loubianka (station également sur la ligne rouge).

Monument de ChoukhovUne petite balade dans ce beau quartier, par ailleurs parfois dénommé comme « le quartier français », car il accueille une petite diaspora due à la proximité de bureaux d’entreprises françaises, de la célèbre école du CREF ainsi que du lycée Alexandre Dumas. En débouchant d’une des stations de métro vous pourrez agréablement vous promener dans les allées vertes des deux boulevards Tchisty Proudy et Sretenski, un grand nombre de curiosités architecturales se trouvent dans ce quartier, à commencer par exemple par le monument (14-1) de l’ingénieur Vladimir Grigoriévitch Choukhov (1853-1939), célèbre ingénieur russe puis soviétique, inventeur, il voyagea en Europe et aux États-Unis, l’un des ingénieurs précurseurs des constructions métalliques (à l’image de Gustave Eiffel), il travailla à l’administration des chemins de fer Varsovie-Vienne, puis à l’Académie de médecine militaire, séjourna à Bakou alors que l’industrie pétrolière prenait son essor. Il construisit avec deux collègues, le premier oléoduc de l’empire russe (fin 1878), et développa des réservoirs géants. Il retourna à Moscou et continua à s’illustrer dans des innovations de constructions métalliques dans l’industrie pétrolière, se passionna pour les premiers vélocipèdes et cycles et la photographie, grandes inventions du siècle. Il travailla pendant plus de 40 ans, élu membre correspondant à l’Académie des Sciences de l’URSS (1928), membre honoraire (1929), ces derniers travaux concernèrent la restauration de monuments historiques suite à un tremblement de terre à Samarcande, et à la mise en service d’une unité moderne de raffinage de pétrole dans la région de Bakou (1932). Il fit don à l’Union soviétique de toutes ses inventions et brevet avant sa mort et fut enterré à Moscou dans le célèbre cimetière du monastère Novodiévitchi.

Vous découvrirez également l’incroyable immeuble et complexe de l’Assurance nationale Russie (1899-Monument Assurance nationale de Russie 11902), qui fut construit par les architectes Proskournine et Velichkine. Rappelant beaucoup les beffrois du Nord et de l’Est de la France ou de la Belgique, ce bâtiment garde cependant une influence de la fin de la Renaissance italienne. Les appartements étaient destinés à des personnes fortunées mais la Révolution chassa ces gens. Le pouvoir bolchevique puis soviétique s’empara de l’immeuble par réquisition, et il y fut installé un Commissariat Populaire à l’Éducation dont l’épouse de Lénine, Nadejda Kroupskaya fut une des membres (ce qui explique sa statue que nous verrons plus loin), mais aussi un service ministériel de l’artillerie de l’Armée Rouge dépendant du Ministère de la Défense.

Monument KroupskayaA l’extrémité de cette promenade, un autre monument (14-2) est consacré à Nadejda Konstantinovka Kroupskaya (1869-1939), célèbre épouse d’un certain Vladimir Lénine qui bien que dans l’ombre de son mari joua un rôle considérable dans la Révolution bolchevique. Elle rejoignit un groupe d’étudiants marxistes à Saint-Pétersbourg (1891-1896), et y rencontra Lénine (1894), mais fut bientôt inquiétée pour ses activités politiques et déportée avec lui en Sibérie (1896). Elle l’épousa en exil (1898), et suivit ensuite sa destinée et ses périples jusqu’en Suisse, puis le retour en Russie dans le fameux train plombé des Allemands (1917). Elle fut membre de la Commission d’État de l’Éducation, la belle jeune fille étant devenue une grosse femme empâtée et bouffie. Elle occupa d’importants postes, partant en mission, bolchevique implacable particulièrement hostile à la religion orthodoxe, elle assista Lénine dans ses derniers instants, écrivit son testament (1924) et continua à occuper des fonctions, écrivant par ailleurs dans les lignes de La Pravda. Elle fut membre du Comité central du Parti (1927), elle s’engagea dans la lutte contre Staline en soutenant l’opposition timide de Zinoviev et de Kamenev. Intouchable par son statut de veuve de Lénine, Staline n’osa pas s’attaquer directement à elle, mais élimina progressivement toute opposition, elle fut dans les dernières années élue député du Soviet Suprême de l’URSS et même membre du Présidium du Soviet Suprême (1937), âgée et malade elle mourut bientôt (1939). Elle fut incinérée et ses cendres placées non loin de son époux, dans une urne déposée dans le mur du Kremlin proche du Mausolée de Lénine. En arrivant à cette extrémité des allées vous pourrez apercevoir les clochers dorés du célèbre monastère de Sretenski qui joua un grand rôle dans l’histoire de Moscou et même de la Russie (14-3).

En partant dans la direction inverse vous découvrirez d’autres monuments dans les allées mais seMonument à Griboedov prolongeant tout le long du boulevard Tchisty Proudy, qui accueillent parfois des expositions temporaires, comme pour la célébration du 9 mai et l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, ou s’illumine pour les fêtes du Nouvel An et de Noël. Vous pourrez voir le monument (14-4) consacré à Alexandre Griboïedov (1794-1829), auteur dramatique, compositeur mais aussi diplomate russe, célèbre pour sa pièce de théâtre Le malheur d’avoir trop d’esprit (1821-22), œuvre censurée par le pouvoir tsariste qui cependant circula clandestinement pour être finalement autorisée et présentée au public après la mort de l’auteur (1831). Il avait servit dans l’armée russe durant les campagnes de 1812 à 1815. Très influencé par ce qu’il vit et vécut durant cette période en Europe, en Allemagne ou en France, il fut l’un des fondateurs de la loge maçonnique Du Bien (1817), embrassant ensuite une brillante carrière diplomatique. Il s’illustra dans un duel la même année, duel à quatre, triste tradition hérité des usages aristocratiques, qui bien qu’interdite fit encore de sérieux ravages dans l’élite russe (Pouchkine et Lermontov disparurent dans des duels). Il fut soupçonné d’être un des révolutionnaires décabristes et arrêté à Grozny puis transféré à Saint-Pétersbourg (1826). Malgré de forts soupçons, aucunes preuves ne furent découvertes contre lui et il fut bientôt relâché reprenant son poste diplomatique à Tiflis. Il fut massacré par des fanatiques musulmans persans, qui s’emparèrent par la force de l’Ambassade de Russie à Téhéran et massacrèrent tous les Russes dont ils purent s’emparer (1829). Sa mort dans la fleur de l’âge privait la Russie d’un potentiel écrivain majeur de ce siècle, aux côtés de beaucoup d’autres.

Monument Abaï KounanbaevVous découvrirez un peu plus loin le monument (14-5) du poète Kazakh Abaï Kounanbaev (1845-1904), un des pères de la nation Kazakhe. Fin connaisseur de la langue russe, il traduisit en Kazakh de très nombreux auteurs russes, dont Lermontov ou Pouchkine, mais aussi des auteurs européens comme Goethe ou Byron. Il existe d’innombrables monuments à sa mémoire à travers le Kazakhstan, il fut par ailleurs également compositeur, philosophe, philologue, fondateur de la littérature écrite de son pays, l’équivalent du grand Pouchkine pour la Russie. Il fit beaucoup pour le rapprochement de la culture russe et européenne avec le Kazakhstan et se revendiquait d’un islam modéré, éclairé et paisible dans l’esprit de tolérance, de partage et d’amitié entre les peuples. Les allées se terminent ensuite par un agréable étang, lieu apprécié des Moscovistes, les abords de cette promenade fourmillant également de constructions architecturales élégantes, datant pour beaucoup du XIXe ou du début du XXe siècle, avec la présence d’ambassades, mais aussi de cafés agréables.

Le petit plus : durant les saisons hivernales, une patinoire, loisir et sport très populaire en Russie,Tchisty Proudy s’installe à Tchisty Proudy. On peut aussi y apercevoir de temps à autre des actions et des spectacles, comme la distribution des tulipes des allées aux badauds (avant qu’elles ne soient fanées et pour faire plaisir aux riverains avant que ne soient plantées d’autres fleurs), des reconstitutions historiques et bien d’autres événements variés, vous pourrez même canoter sur un pédalo ! En poursuivant un peu plus loin que les allées, vous découvrirez encore un petit parc, comprenant un autre monument (14-6) en mémoire de Nicolas Tchernychevski (1828-1889), écrivain et philosophe, révolutionnaire qui inspira les futures générations de bolcheviques, notamment à travers son roman Que Faire (1862-1863), qu’il rédigea enfermé dans la forteresse Pierre et Paul à Saint-Pétersbourg.

Durée : du quart d’heure à une petite heure si vous prenez le temps d’admirer tous les monuments.

Aucun surcoût à prévoir, sauf dans le cas où vous voudriez faire un tour de pédalos bien sûr.

Conseil : En hiver, si le lieu reste agréable, il peut se trouver très venté et au vu du climat moscovite, venez de toute façon bien habillés, avec gants, bonnets et écharpes, collants finlandais et manteau d’hiver !

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