Le magasin Elisseïev

19-13- L’épicerie fine Elisseïev, catégorie de La soif de la Russie éternelle

Accès : soit en remontant la rue Tverskaya depuis la station de métro Okhotny Riad (ligne rouge), soit directement en arrivant de la station de métro Pouchkinskaya (ligne mauve).

Célèbre et grandiose épicerie fine, magasin moscovite qui fut fondé par l’homme d’affaires et millionnaire Grégori Elisseïev (1901), proposant à une clientèle huppée des produits luxueux et rares, mets fins et exotiques, vins et alcools de renoms. Lors de son inauguration, cet homme avisé offrit sur cartes d’invitations un banquet à des personnages célèbres de l’aristocratie dont le grand duc Serge (gouverneur général de Moscou), ou encore des sommités de l’antique capitale. L’événement resta gravé dans les mémoires par son faste. Il eut immédiatement un grand succès, avec ses différents services, la torréfaction du café fut proposée à la clientèle un peu plus tard (1913). Pour attirer la meilleure clientèle, un personnel polyglotte fut recruté, les Moscovites fortunés pouvaient se procurer des choses vraiment introuvables dans Moscou, des fruits exotiques, des sardines de l’Atlantique, de l’authentique huile d’olive, du champagne français, les meilleures productions de Russie.

Grégori Elisseïev (1864-1949) avaient fait des études d’œnologie à l’étranger et revînt en Russie (1893), pour travailler dans l’entreprise familiale, une compagnie de négoce d’import-export. Il ouvrit plusieurs magasins célèbres, dont celui de Saint-Pétersbourg, une confiserie, et celui qui nous intéresse. Il fut commissaire lors de l’Exposition internationale de Saint-Louis (dans le Missouri en 1904), qui accueillit aussi les premiers Jeux Olympiques d’été se déroulant aux États-Unis. Il fut anoblit par le tsar (1910), mais des heures sombres se présentèrent par la suite. Son épouse mit fin à ses jours (1914, ils s’étaient mariés en 1883, sept enfants naquirent de cette union). Il n’assista pas à ses funérailles et se remaria 25 jours plus tard avec la femme d’un autre homme d’affaires de Petrograd. A la Révolution, il perdit son magasin et la plupart de ses biens immobiliers, mais ayant une résidence à Paris, une autre à Istanbul, ayant placé depuis longtemps son argent dans des banques étrangères, il sentit le vent tourner. Il se réfugia dans un premier temps en Crimée, lieu de villégiature apprécié des aristocrates et de la bourgeoisie russe. Il préféra également l’évacuer (janvier 1920), alors que les armées blanches étaient bientôt défaites, et s’installa à Paris. Il fut naturalisé Français et s’installa dans une riche propriété à Pontoise, il mourut âgé et fut inhumé au cimetière de Sainte-Geneviève-des-Bois où reposent de nombreux Russes.

Le magasin fut confisqué par les révolutionnaires (dès 1917), et officiellement les bolcheviques le renommèrent « Gastronome numéro 1 ». Il garda quelques prérogatives puisque dans les années 30, il se trouvait être le seul magasin moscovite où l’on pouvait se procurer… des ananas. Lors de l’invasion allemande, il fut victime de pillards avant que ne soit instaurée la loi martiale dans Moscou. En effet, devant la reprise de l’avance allemande (octobre 1941), un début de panique commença dans la ville et des habitants se ruèrent sur divers commerces dont le magasin Elisseïev qui fut pillé et ravagé. L’ordre fut bientôt rétabli par des unités du NKVD, les fuyards, des suspects et des pillards furent fusillés. L’année suivante, le magasin fut rouvert mais réservé à la fourniture de denrées pour la nomenclature des cadres du Parti communiste et des administrations soviétiques. Malgré que les cartes de rationnement soit d’actualité ici comme ailleurs, le magasin fut autorisé à vendre des marchandises contre de l’argent (selon des prix élevés, à partir de 1944), mais ceci donna lieu à des trafics qui furent découverts en 1950. A partir des années 60, jusqu’à la fin des années 80, le magasin Elisseïev fut le seul autorisé à rester ouvert jusqu’à 22 heures. Sous l’égide d’un nouveau directeur, il se modernisa par l’achat de réfrigérateurs (1972), mais fut au cœur de nouveaux de trafics et de pots de vin immédiatement après la mort du Premier Secrétaire du Parti, Léonid Brejnev (1982).

Ces temps sombres de la Perestroïka étant maintenant bien loin, le magasin fut privatisé (2002), son immense popularité et son chiffre d’affaire ne cessant dès lors d’augmenter, alors qu’avec la participation du gouvernement russe, le magasin a été entièrement rénové (notamment les plafonds, les dorures, sculptures etc., 2003). Il reste l’une des attractions touristiques les plus visitées de Moscou.

Le petit truc en plus : malgré des prix assez fort, vous aurez la possibilité d’acheter quelques mets russes assez rares et chers, les célèbres caviars rouges ou noirs de Russie, les meilleures vodkas et alcools et bien d’autres choses encore. Comme il s’agit d’un magasin, l’entrée est libre, vous pourrez donc simplement déambuler dans ses murs pour le plaisir des yeux !

Conseil : faites particulièrement attention avec vos sacs à dos, le casse tête du restaurateur et conservateur des musées, qui vissé dans votre dos sera un instrument de dégradation redoutable par le biais des frottements et de vos allées et venues sans prendre garde à ce qui se passe autour de vous… et dans votre dos !