Le cimetière du monastère Donskoï

16-14- Le cimetière du monastère Donskoï, un petit Père Lachaise russe Catégorie de L’amour de l’architecture et La passion pour l’histoire

Accès : par la station de métro Chabolovskaya (ligne orange, une seule sortie vers la ville possible, personne ne pourra se tromper !).

Le monastère Donskoï (16-10) est probablement l’un des endroits les plus étonnants de Moscou, très similaire à d’autres monastères moscovites pris d’assaut par des hordes de touristes asiatiques et européens, vous bénéficierez dans ce dernier d’un grand calme, d’une présence modeste de visiteurs et d’une atmosphère vraiment particulière. D’importants travaux sont en cours et seront longs à aboutir, concernant les 12 tours du monastère, la muraille, mais aussi les édifices intérieurs, comme la grande cathédrale du monastère. Malgré l’aspect fouillis et désordre du premier contact, la visite du cimetière restera sans doute l’une des plus incroyables que vous puissiez faire à Moscou. Visiter un cimetière ? C’est une idée saugrenue qui ne choquent personne lorsqu’il s’agit du cimetière du Père Lachaise à Paris, aussi vous vous rendrez dans celui de Donskoï dans le même esprit. Vous y découvrirez de nombreux monuments funéraires qui sont de véritables œuvres d’art, les plus anciennes tombes datent de l’époque de la Grande Catherine (vers 1770), et très vite l’endroit fut populaire pour les plus grandes familles bourgeoises et aristocratiques. Ils firent élever des caveaux, parfois des tombes-chapelles ou même de petites églises au milieu d’un parc arboré.

Bien que n’ayant pas échappé aux destructions durant l’ère stalinienne, le cimetière lui ne fut pas « nettoyé » et transformé en profondeur comme d’autres exemples à Moscou ou en Russie. Il s’y trouve un nombre assez impressionnant d’officiers ayant servi durant la Guerre Patriotique de 1812, des généraux, des officiers qui firent ensuite de longues carrières, mais aussi des princes et des aristocrates de toutes les grandes familles russes, Dolgorouki, Narichkine, Ouchakov, Golitzine, Bagration et tant d’autres noms prestigieux côtoient des médecins, des poètes et des écrivains, des professeurs d’université et des ingénieurs, c’est aussi ici que vous découvrirez la tombe de Joseph Beauvais, l’architecte talentueux responsable de tant de splendeurs dans Moscou, après sa reconstruction (suite à l’incendie de 1812). C’est un très important lieu de mémoire pour la Russie blanche, puisque vous y verrez aussi la tombe d’Anton Denikine (1872-1947), célèbre général des armées blanches du Sud de la Russie pendant la guerre civile russe qui après une épopée digne des plus grandes sagas historiques put s’enfuir, mourut aux États-Unis en exil et fut finalement rapatrié et inhumé dans le monastère en 2005. Il serait très long de décrire toutes les destinées étonnantes des gens qui reposent en ce lieu, y compris par ailleurs quelques sommités soviétiques, ou encore l’un des plus grands écrivains de son temps, Alexandre Soljénitsyne (1918-2008), l’immense écrivain, poète et romancier russe, auteur de L’Archipel du goulag, prix Nobel de littérature (1970), banni d’Union soviétique (1974), qui put terminer sa vie en Russie. Ce monument de la littérature russe, par ailleurs bien incompris des Occidentaux (cf ses œuvres en exil comme Le Déclin du courage, 1978, ou Nos pluralistes en 1983), repose donc modestement au cimetière du monastère Donskoï.

Le petit truc en plus : non loin de l’entrée du monastère vous découvrirez dans son enceinte un petit magasin épicerie et buvette, où pour des prix très modiques vous pourrez boire un café, acheter des Pirarchki russe (chaussons fourrés de divers ingrédients), du Mors fait maison (boisson non alcoolisée à base de fruits rouges), des gâteaux également fait sur place, ainsi que des pains d’épices russes et autres succulentes spécialités.

Aucun surcoût à prévoir, le lieu étant tout à fait libre d’entrée, les pèlerins et les croyants peuvent verser dans le tronc leur obole, vous pouvez aussi participer pour aider à la reconstruction et restauration du monastère. Ce sont des volontaires et des mécènes privés qui participent essentiellement à ces travaux coûteux.

Conseil : C’est un monastère où vivent des moines, il y a une activité religieuse, les hommes entreront avec des habits décents (sans short), les femmes se couvriront la tête d’un foulard, respect essentiel des croyances et du lieu. Cette visite est propice à la période printanière, estivale et automnale, l’hiver, la neige recouvrant l’essentiel du cimetière, vous perdriez la sève de cette visite.